Le Japon selon ses légendes: héros
et kamis
Susanô-ô n'était
pas dépourvu de tendresse... mais il n'en avait que pour sa soeur Amaterasu.
Il décida alors de se rendre auprès d'elle pour une simple visite
de courtoisie.
Les kamis, toujours logés dans la voie
lactée, voient ce puissant et violent kami se diriger vers leur royaume:
affolés, pensant qu'il peut venir destabiliser leur monde, ils vont
voir Amaterasu pour lui demander de s'occuper
de lui. Ils ne l'appréciaient pas car ils étaient également
toujours obligés de réparer les terribles dégâts
qu'il cause sur Terre après son passage.
Amaterasu etait elle même très sceptique,
elle se méfiait de son frère: elle n'approuvait pas ses manières
brutales et sa grossièreté.
Elle se saisit de son arc divin, en bois laqué
de couleur rouge vif, et de deux immenses carquois remplis chacun d'un millier
de flèches. Elle se poste à l'entrée du royaume, prenant
appui sur des nuages pour conforter son assise et brandit son arc déterminée
à stopper Susanô-ô dans son
élan.
Malheureusement, il fut la cause de nombreux troubles et
sa présence au Royaume divin ne fut pas
tolérée très longtemps. Et c'est Amaterasu
elle-même qui en fit les frais.
Parmi ses nombreuses activités, Amaterasu
aimeait faire de la couture.
Entourée de ses servantes, elle s'affairait en toute tranquilité.
Soudain, le toit se fendit d'une béante fissure. Les débris
tombaient dans la salle, les couturières étaient affolées.
Un poulain écorché tombait dans la salle pendant qu'un rire
- le rire du terrible Sousanô-ô -
se fit entendre. Il était satisfait d'avoir fait une bonne blague à
sa soeur. Les vibrations qu'il provoquait firent tomber dans la salle de couture
de nouveaux débris et des tuiles: de nombreuses servantes sont blessées,
d'autres paniquées par le sang du poulain. Et surtout, Amaterasu est
elle même blessée, un doigt a été sérieusement
abîmé par la navette de son métier à tisser.
Le grand conseil des Dieux, composé
des cinq premiers couples de kamis décidèrent de convoquer tous
les kamis. Bientôt ils furent des millions à se réunir
devant le Conseil.
Cependant, même une fois réunis, ils ne trouvaient aucune idée
qui puisse convaincre Amaterasu. Seul le kami
"plein d'idées" (Takami
Musubi) trouva une solution: il fallait faire chanter les coqs afin
qu'ils appellent de leur chant Amaterasu.
Les autres kamis furent enthousiasmés et
bientôt des milliers de coqs furent posés sur des toriis.
Mais Amaterasu ne se montra pas: les dieux comprirent
les coqs étaient de bien vaniteuses créatures qui pensaient
que c'était leur chant qui chaque jour faisait se lever le soleil.
Le kami "plein d'idées"
(Omoikane) énonça une nouvelle solution:
Amaterasu est une femme, elle est donc enclin
à la jalousie comme toutes les femmes.
Les autres kamis furent immédiatement convaincus par cette idée.
Ils allèrent déraciner un arbre géant sur lequel ils
disposèrent, pendus à ses branches, des guirlandes ornées
de pierres précieuses fabriquées par Tamanoya.
Le kami qui travaillait à la forge
Ishikori Dome (et qui n'a qu'un seul oeil) fabriqua
un miroir géant (Okagami)
avec des panneaux en or. Ils disposèrent le tout non loin de la caverne
où s'était enfermée la déesse du soleil.
Puis ils allumèrent des milliers de feux
dont la lumière vint se réflechir sur le miroir et les joyaux
pendus aux branches de l'arbre. Ils se mirent à rire, à chantonner
et à célébrer cette nouvelle source de lumière.
Ils proclamaient ce nouveau soleil. Uzume, déesse
de la danse, entraîna les kamis dans une incroyable
farandole.
D'abord intriguée par toute cette activité,
elle observait la scène grâce à quelques fissures dans
le rocher qui bouche l'entrée de sa caverne. Puis elle fut jalouse,
pensant que les kamis l'avaient déjà
oublié: elle ne supportait pas l'idée d'être remplacée
ainsi.
Et elle sortit de sa caverne s'approchant rapidement de la nouvelle déesse.
Elle vit alors la plus belle des femmes se dresser devant elle.
Surprise, elle comprit rapidement qu'elle contemplait son propre reflet dans
le gigantesque miroir confectionné par le kami
forgeron.
Dépitée elle voulut rejoindre sa caverne. Mais le kami
"de la puissance" Tajikarao
obstrua en un éclair l'entrée de la grotte. La grotte fut alors
condamnée à l'aide de la Shirikumi no nawa (corde empêchant
le retour).
Cette corde est à l'origine du shimenawa.
Amaterasu était un peu perdue mais elle
réalisa que tout ce stratagème avait été mis en
place pour elle: les kamis tenaient beaucoup à
la déesse du soleil. Ayant repris ses esprits, Amaterasu s'empara du
miroir (Okagami) et de la chaîne de joyaux
(Magatama), remerciant les dieux pour ces magnifiques
présents.
C'en était fini de l'obscurité: à nouveau,
le jour succédait à la nuit. C'était un grand jour de
joie au Royaume des Kamis.
Susanô-ô qui avait assisté
passivement à tous ces évènements décida de prononcer
quelques paroles pleines d'ironie. A peine eut-il prononcé quelques
mots que les millions de kamis lui dirent de se taire. "Retourne
dans l'océan, sur la Terre! Retourne en bas!". Ils se saisirent
violemment de lui, lui arrachant au passage quelques ongles et sa barbe. Puis
ils le jetèrent dans l'océan. Ce seront les hommes qui devront
supporter sa fureur.
Le kami impétueux provoqua pendant quelques temps
de nombreuses tempêtes autour et sur les îles de l'archipel créé
par Izanagi et Izanami.
Mais il finit par se calmer et se mit en quête d'un endroit paisible
pour s'y établir.
C'est la province d'Izumo qui retint son attention.
Il s'y posa et marcha longtemps avant de rencontrer des humains.
Susanô-ô alla se dissumuler dans
les bois épais de la forêt voisine.
A peine était il installé que surgit Koshi.
Il fut rapidement attiré par l'odeur du saké. Chacune de ses
têtes franchit une porte et vint s'abreuver. Le monstre devint rapidement
saoûl.
Voyant cela, Susanô-ô planta son sabre
dans le corps inanimé. De la large blessure coula un flot de sang qui
vint rougir la rivière voisine en s'y déversant: le flot ne
se tarit qu'en fin de journée. Seule une des queues du monstre bougeait
encore un peu.
Susanô-ô voulut en finir et tenta
de la trancher.
Surpris, il vit son sabre qu'il pensait indestructible se briser en trois
morceaux. Intrigué, il écarta les chairs encore chaudes pour
voir ce qu'il y avait dans cette queue: il trouve un immense sabre (Kusanagi
no Tsurugi), le plus beau qui puisse exister.
Il était aussi parfaitement équilibré et malgrè
sa taille était fort léger. Susanô-ô
l'essaya immédiatement: il trancha un énorme tronc d'arbre aussi
facilement que quelques brins d'herbes.
Le rocher voisin fut tout aussi facilement découpé.
(...Suite Page 2...)
A ce moment du récit
nous connaissons les
trois trésors du Shintô qui sont:
"Kusanagi noTsurugi" (l'épée "qui fauche l'herbe"),
"Yaata no Okagami" (le miroir) et "Yasaka no Magatama"
(les joyaux).
Récits du Kojiki
Epoque I - L'ère des Dieux
page 1
page 2
page 3
Epoque II - L'âge des Empereurs
page 1
page 2
page 3
Le Kojiki: le livre